Cela fait des mois que Felix, votre petit démon à moustaches, fait de votre vie un enfer ! Fermement décidé à laisser son empreinte à la postérité, il griffe quotidiennement les meubles de votre appartement. Le fauteuil de la chambre et les chaises de la cuisine ont rendu l’âme. Seul le canapé du salon résiste encore … mais pour combien de temps ?
Vous avez tout tenté pour l’en dissuader : l’invectiver d’un « NON » ferme, lui donner une tape sur les fesses, l’asperger avec un vaporisateur d’eau, même de le prendre par la peau du cou et l’enfermer dans une pièce sans meuble. Rien n’y fait, il recommence à chaque fois !
Pourtant, vous êtes persuadé « qu’il sait que ce qu’il a fait est mal et qu’il n’a pas le droit de griffer les meubles ». La preuve en est que dès qu’il pose une griffe sur l’accoudoir du divan et qu’il vous voit arriver avec votre vaporisateur, il s’enfuit en courant … pour mieux recommencer plus tard dès que vous aurez le dos tourné.
Pourquoi mon chaton est-il mal éduqué ?
Tout d’abord, les comportements du chat que nous qualifions de désagréables, comme de griffer le mobilier, grimper sur les meubles, uriner en dehors du bac à litière, etc., sont inacceptables seulement de notre point de vue d’humain, parce qu’ils ne se conforment pas à nos règles de vie.
Cependant, si l’on considère la perspective du chat, on se rend compte que la plupart des comportements dérangeants répond à des besoins naturels propres à son espèce : grimper, sauter, « faire ses griffes », éliminer, etc. Si le chat fait des « bêtises », c’est que bien souvent, les contraintes environnementales qui lui sont imposées ne tiennent pas compte de ses impératifs biologiques. Le chat a donc peu de marge de manœuvre pour assouvir ses besoins.
Par exemple, le milieu de vie ne propose pas de support adapté pour faire ses griffes, la litière est trop petite et mal placée pour faire ses besoins, il n’y a pas de points d’observation en hauteur accessibles au chat (arbres à chat, tablettes), etc.
Par conséquent, les « bêtises » effectuées par le chat ne sont en aucun cas des actions menées volontairement pour vous nuire et vous rendre la vie impossible. Ce sont des comportements qui reflètent un problème d’origine médicale, environnementale ou relationnelle (avec les humains, les chats ou les autres animaux de la maison).
Le chat comprend-t-il la notion de « « bien ou mal » ?
La distinction du bien et du mal repose sur un code moral. Dans nos sociétés humaines, ces principes moraux sont inculqués au cours de notre éducation et varient grandement d’une culture à une autre. Par exemple, certains gestes sont perçus comme polis dans certains pays, mais inconvenants dans d’autres. Il est donc illusoire de croire que le chat puisse avoir la capacité de juger ses propres actes à partir d’informations qu’il ne peut obtenir et dont il n’a même pas la faculté de comprendre.
Le chat peut-il se sentir coupable ?
Pour ressentir de la culpabilité, il faudrait que le chat soit capable de faire la distinction entre ce qui est bien ou mal.
Cependant, vous allez me dire : « Mais mon chat a pourtant l’air coupable quand je le dispute ! ». Ce que vous interprétez comme « un air coupable » est en fait une réponse émotionnelle de peur en réaction à votre réprimande : le chat va chercher à se cacher, sa posture corporelle est aplatie, tête rentrée, oreilles couchées, et il détourne le regard (cf. tableau du langage corporel à télécharger).
Définition de la punition et son fonctionnement
La punition est une conséquence à un comportement qui diminue la probabilité de l’apparition de celui-ci. Toujours désagréable pour le sujet, elle se manifeste de deux façons :
- par le retrait d’un agrément (on parle alors de punition négative). Par exemple : le chat est privé de caresses ou d’interaction lorsqu’il miaule pour attirer l’attention.
- par l’ajout d’un désagrément (on parle alors de punition positive). Par exemple : le chat est aspergé avec un vaporisateur d’eau lorsqu’il monte sur la table.
(Noter ici, que les termes « positif » et « négatif » n’ont pas une connotation de bien ou de mal)
La punition positive est celle largement utilisée par les adoptants pour réprimander leur animal dans le but qu’il cesse les comportements qu’ils jugent inacceptables. Or, elle ne devrait jamais être utilisée en raison des effets néfastes qu’elle implique : inconfort, stress, anxiété, douleur. En effet, qu’il s’agisse d’asperger, de fesser, de prendre le chat par la peau du cou, de lui crier dessus, ces agissements ne sont pas sans conséquence.
Les conséquences à l’emploi de méthodes aversives sur le chat
Reprenons l’exemple de Félix qui se fait asperger d’eau lorsqu’il fait ses griffes sur le canapé.
Point de vue de l’adoptant : « Dès qu’il me voit approcher avec mon vaporisateur, il fuit. Il a compris qu’il ne doit pas griffer le canapé, mais pourtant il recommence quand il ne me voit pas ».
Point de vue du chat : « Quand mon adoptant apparaît et que je griffe le canapé, je reçois de l’eau sur moi. C’est désagréable, je fuis. Lorsque je suis SEUL dans le salon, je ne reçois pas d’eau sur moi. Je n’irai plus dans le salon lorsque mon ADOPTANT Y SERA ».
Alors que le but ici est de dissuader Felix de faire ses griffes sur le canapé, ce dernier va juste éviter de le faire en présence de l’adoptant.
Vous l’aurez compris, non seulement la réprimande ne résout rien, mais employée de manière répétitive elle aura pour effet que l’animal associe la conséquence désagréable à l’humain qui l’inflige. À terme, le lien de confiance entre l’animal et son adoptant va se détériorer. Le chat, s’il vit en milieu confiné, cherchera à se cacher, à s’isoler pour demeurer loin de son humain devenu un élément désagréable ou anxiogène. S’il a possibilité de sortir en extérieur, il pourrait potentiellement se mettre à la recherche d’un autre foyer.
Au delà des effets néfastes évoqués précédemment, punir son chat peut avoir des conséquences désastreuses lorsque le comportement incriminé est causé par une situation stressante : le chat qui se met à uriner sur le lit de l’adoptant suite à un déménagement par exemple. L’emploi de la réprimande dans ce cas précis, aura l’effet inverse que celui escompté, à savoir d’amplifier le comportement indésirable en ajoutant une source de stress supplémentaire.
Comment empêcher son chat de faire « des bêtises » ?
L’identification de la motivation qui pousse votre chat à effectuer le comportement désagréable à vos yeux est le premier pas vers la résolution pour y mettre fin. La cause, une fois déterminée, conditionne les actions à mettre en place pour faire cesser le comportement, à savoir présenter une meilleure option au chat que vous jugerez acceptable.
Felix griffe le canapé ? Je vais trouver un griffoir adapté, conforme à ses préférences et le placer à un endroit qui lui convient.
Identifier la motivation du chat à adopter un comportement inadéquat
Il faut savoir qu’un même comportement exécuté par un chat peut cacher des motivations diverses. Il est important de bien identifier le contexte pour en comprendre la cause.
Par exemple, un chat qui monte sur la table peut le faire pour plusieurs raisons :
- Observer son environnement. Le chat vit en trois dimensions. Il a besoin de grimper et de pouvoir observer en toute sécurité sur des endroits situés en hauteur et la table représente un endroit stratégique d’observation. Solution : aménager un espace en hauteur (arbre à chat ou tablette) à proximité.
- Obtenir de la nourriture. L’odeur des aliments a attiré Minou qui monte sur la table au moment des repas. Solution : entraîner le chat à rester au sol et le récompenser (voir plus bas)
- Demande d’attention. L’humain est la seule source de stimulation dans la maison. Monter sur la table est la seule action qui provoque une interaction en conséquence. Ainsi, un « NON » ferme, un « pschitt » d’eau peuvent être divertissants (même si un peu désagréables sur le moment) pour le chat qui obtient ce qu’il voulait : de l’intérêt. Solution : ajouter des activités autonomes (gamelles ludiques alimentaires), des activités interactives (jeux, entraînement) pour fournir plus de stimulation.
Pour les cas de conflits entre chats, punir l’instigateur des altercations ne fait qu’empirer la situation en plus d’augmenter les risques d’attaques potentielles envers l’humain qui réprimande. La résolution des conflits implique d’identifier les causes des mésententes : introduction récente d’un nouveau chat, agression au retour d’une visite vétérinaire, agression redirigée, etc. Nous suggérons fortement de vous faire aider par un intervenant en comportement félin pour régler le problème.
Rappelons enfin que tout changement de comportement soudain peut être dû à un problème médical (éliminations en dehors des bacs à litières, miaulements intempestifs, grignotage de matières non nutritives, etc.). La solution est bien sûr de consulter le vétérinaire pour vérifier l’état de santé de votre petit compagnon.
Méthodes pour modifier un comportement indésirable
Le principe fondamental est d’amener le chat à choisir un comportement acceptable (selon votre jugement) en le récompensant, au détriment d’un comportement indésirable. Le renforcement positif, qui est l’inverse de la punition, consiste à ajouter un agrément en conséquence à un comportement afin d’augmenter la probabilité qu’il se reproduise.
Voici un exemple : votre chat a pour habitude de monter sur la table pour voler de la nourriture quand vous prenez vos repas. Vous voulez faire cesser ce comportement. La méthode à suivre est de déposer le chat au sol dès qu’il grimpe sur la table et de le récompenser lorsqu’il reste au sol (en donnant au départ beaucoup de friandises pour l’inciter à rester). Ainsi, votre chat va rapidement comprendre que lorsqu’il monte sur la table, il n’obtient rien puisqu’il est enlevé de la table, alors que s’il n’y grimpe pas il obtient des friandises. Il va donc faire en sorte de rester au sol puisque cela lui rapporte.
Quel que soit le renforçateur que vous utilisez, il est primordial qu’il ait une valeur très élevée pour votre chat. C’est généralement un aliment fortement appétant qui est utilisé, mais vous pouvez aussi vous servir d’un jouet ou de caresses, si votre chat est joueur ou particulièrement câlin. Dans tous les cas, il faut que le renforçateur soit d’un grand intérêt pour votre chat.
Le renforcement positif est une méthode d’apprentissage qui peut être utilisée non seulement pour modifier des comportements indésirables, mais aussi pour faciliter des soins (brossage, coupe de griffes), ajouter une activité ludique supplémentaire, bénéfique pour votre petit compagnon et enrichir la relation entre vous et votre chat.
En conclusion, le renforcement positif est bien plus efficace que la réprimande pour régler de façon durable des problèmes de cohabitation avec nos chats. Notez par contre que certaines problématiques nécessitent des méthodes de résolution plus complexes. N’hésitez donc pas à nous solliciter pour que nous puissions vous venir en aide.
Rédaction par Sophie Legrand
Éduchatrice et auxiliaire vétérinaire spécialisée
Pour en savoir plus sur le sujet, venez assister à nos conférences en ligne où nous parlons des méthodes d’apprentissage efficaces :
- Tout savoir pour un chat sans problème
- Chat s’entraîne !
- Intelligence, perceptions et émotions du chat
Poursuivez votre lecture :
- 5 clés essentielles pour bien choisir votre chat
- Dix solutions qui déchirent pour empêcher votre chat de tout détruire
- Comment empêcher votre chat de vous attaquer sans raison
Services qui pourrait vous intéresser :